Les avocats de l'ancien "M. Afrique" d'Elf, André Tarallo, ont refermé lundi le procès de 37 personnes soupçonnés de détournements de fonds à Elf, après trois mois et demi d'audience.
Me Pierre Benoliel, Guillaume le Foyer de Costil et Michel Halperin ont soutenu que leur client n'était coupable d'aucun enrichissement personnel "excessif" et que les sommes versées pour corrompre des dignitaires étrangers ne pouvaient pas faire l'objet de poursuites. * Le jugement sera rendu le 12 novembre. Le procès, ouvert le 17 mars, est considéré comme emblématique des enquête sur la corruption dans les années 90 et le jugement est très attendu. L'audience n'a pas été favorable aux prévenus, contre lesquels ont été présentés de nombreux éléments matériels, qui montrent, selon l'accusation, qu'environ deux milliards de francs ont été détournés des caisses d'Elf de 1989 à 1993. Parmi les 37 prévenus, c'est André Tarallo, 76 ans, qui risque le plus gros. Comme contre l'ex-"directeur des affaires générales" d'Elf Alfred Sirven, écroué depuis février 2001, une peine de huit ans de prison ferme et cinq millions d'euros d'amende a été demandée contre André Tarallo, avec une incarcération dès le jugement, même en cas d'appel. La mesure serait plus pénible que pour Alfred Sirven puisqu'à la différence des autres prévenus André Tarallo n'a pas purgé un seul jour de détention provisoire et la peine devrait donc être exécutée intégralement. CORRUPTION TOLEREE
Les avocats de l'affaire estiment que le tribunal frapperait aussi, en suivant le parquet, une personnalité forte de la vie publique française, camarade de promotion de Jacques Chirac à l'Ena en 1957 et dirigeant d'Elf de 1967 à 1997, première société française par le chiffre d'affaires. Tentant de contredire le parquet, qui impute la responsabilité d'un détournement de 300 millions de francs à leur client, les avocats d'André Tarallo ont d'abord estimé qu'il n'avait été que l'homme d'un système où la corruption était tolérée. "En certains cas, l'infraction peut rendre service à la société. Et, en l'espèce, c'est tout à fait évident (...) Est-ce que M. Tarallo n'aurait pas commis une faute s'il ne s'était pas soumis au réel ?" a plaidé Me Le Foyer de Costil. L'avocat a même estimé que, sans les sommes versées avec l'argent d'Elf à des dirigeants africains par André Tarallo, "Elf aurait été réduit à exploiter des champs pétrolifères en Seine-et-Marne". Ils ont également repris l'argument développé à l'audience par le dirigeant d'Elf, selon lequel les centaines de millions de francs qui ont crédité ses comptes bancaires personnels en Suisse auraient en fait été destinés à Omar Bongo, président du Gabon, pays-clef pour les concessions pétrolières d'Elf. Omar Bongo a nié de longue date ces assertions dans la presse et dans un livre intitulé "Blanc comme nègre". Les conseils de l'ex-"M. Afrique" ont passé rapidement sur l'enrichissement personnel imputé à leur client, estimant qu'il correspondait au standing d'un dirigeant de grande société. Ils ont soutenu que le tribunal ne pouvait sanctionner juridiquement la villa qu'André Tarallo s'est faite construire à Bonifacio, en Corse, avec l'argent d'Elf et dont la valeur est estimée à 152 millions de francs. Ce bâtiment de 1.300 m2 dominant la mer était entouré de deux maisons de service, d'une unité de thalassothérapie, d'un oratoire, d'une gigantesque piscine et de onze hectares de terrain ornés d'arbres centenaires importés du continent. Seuls les utilisateurs enregistrés peuvent laisser un commentaire. SVP, connectez vous ou enregistrez vous.
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