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« Dans les relations entre Etats, il y a à obéir à trois éléments essentiels », Jean-Marc Misso, enseignant à l’UOB, Spécialiste des relations internationales

Auteur/Source: · Date: 25 Fév 2010
Catégorie(s): Politique

A l’occasion de la visite au Gabon que vient d’effectuer le président français, Nicolas Sarkozy, la rédaction de GABONEWS s’est rapprochée et obtenu du Professeur Jean-Marc Misso, enseignant à l’Université Omar Bongo, spécialiste des relations internationales, une interview exclusif dans laquelle nombre de questions d’intérêt capital ont été abordées.

GABONEWS: Le président français, Nicolas Sarkozy, vient de séjourner au Gabon dans le cadre d’une visite- éclair, d’une journée. Est-ce que cela symbolise le contenu à la fois historique et passionnel des relations entre la France et le Gabon.
PROFESSEUR JEAN-MARC MISSO: C’est un constat en termes de gestion du temps, puisque la politique est une question de management. Dans les relations entre États, il y a à obéir à trois éléments essentiels. Il y a le principe, les faits, c’est à dire les actes qui sont posés, qui sont implémentés. Et enfin il y a les acteurs. Les faits et les actes ne peuvent pas se faire d’eux- mêmes. Ce sont ces éléments de la société, qui agissent, qu’on appelle des acteurs.

Pour répondre à votre question, en termes de gestion de temps c’est très court, pour des pays qui se disent amis. Mais, moi, je comprends, et il faut comprendre. Lorsqu’il y a des actes politiques à poser, notamment des actes de relation de coopération bilatérale fondés sur l’histoire, il faut se prendre du temps.

Sinon, il faut donner du temps au temps, c’est-à-dire se prendre un programme qui permette effectivement, que lors d’un acte de politique étrangère comme un voyage dans un État ami, le cas du Gabon, on se prend un emploi du temps qui permet d’y passer au moins deux jours. C’est cela également l’amitié, c’est cela également la coopération.

GABONEWS: Faut-il toujours croire à un axe privilégié entre Libreville et Paris?

PROFESSEUR JEAN-MARC MISSO : Ce sont des termes de diplomatie. En tant qu’intellectuels, nous parlons de sciences, de la connaissance précise, où les termes sont des termes de référence avec leur précision comme le disait l’écrivaine cubaine en exil à Paris, Mme Zoé Valdes. Il faut donner la force aux mots. C’est le Général de Gaulle qui dit en 1961 devant un parterre, je crois, de Chefs d’Etats: “les Etats n’ont pas d’amis”. Il voulait dire quand on fait une lecture psycho- politique, parce que l’on parle en politique de cette spécialité qu’on appelle la caractériologie.

Or la caractériologie est l’étude d’un caractère d’un système d’Etats où des acteurs agissent dans le cadre de ces Etats, c’est-à-dire des entités politiques. Comme disait le Professeur Edmond Aron “l’homme d’Etat est l’acteur qui représente l’unité politique au nom de laquelle il parle. Lorsque De Gaulles parle, il parle au nom de la France: “Les Etats n’ont pas d’amis, les Etats n’ont que des intérêts”.

Lorsque Sarkozy arrive en Afrique, ce n’est pas en termes d’amitié au sens humain du terme, là encore nous ne devons pas être naïfs. Sarkozy n’est plus Sarkozy en tant que tel depuis qu’il est Chef d’Etat. Il incarne l’entité au nom de laquelle il parle. Lorsqu’il arrive au Gabon, puisque les 549 000 kilomètres carrés ne peuvent pas se déplacer, la géographie est là, c’est lui qui incarne l’histoire de près de seize siècle de la France, depuis Mérovingiens jusqu’à la cinquième République, il incarne tout cela. Lorsqu’il est Chef d’Etat, fini le Sarkozy de la famille, fini même le Sarkozy chef de politique, il devient la dimension de la France, comme cela a été le cas avec de Gaulle, comme cela a été le cas avec Napoléon, comme cela a été le cas avec Henri IV, Charlemagne et ainsi de suite. C’est cette dimension historique au nom de laquelle il agit. Il agit en tant qu’Etat, et comme le dit, Thomas Hobbes au XVIIème siècle, “Les Etats sont des monstres froids”.

Quand il arrive au Gabon, ce n’est pas pour l’amour des gabonais, ce n’est même pas pour l’amour de son collègue Ali Bongo. Il vient au Gabon parce qu’il aime son uranium, son minerai, pour venir voir ce qu’il en est de son bois et ainsi de suite. C’est à ce niveau là que se place la dimension des intérêts entre Etats.

GABONEWS: A propos d’intérêts, justement, le Président Sarkozy, après la présidentielle d’août dernier avait été le premier Chef d’État à féliciter son homologue gabonais en ces termes: ” Nous voulons inaugurer un nouveau partenariat entre Libreville et Paris”. Pensez-vous que le moment est venu pour effectivement asseoir ce nouveau partenariat d’abord dans la forme et dans le contenu ?

PROFESSEUR JEAN-MARC MISSO : Dans le discours politique auquel nous ont habitué les Chefs d’Etats français, De Gaulle, et même Mitterrand le disait en 1982 pendant la campagne et pendant son discours, il l’a réitéré à la Baules en 1990. Ce sont des discours. La rupture effectivement, tout le monde la veut, puisque le constat, et il arrive dans le contexte de la célébration de notre cinquantenaire.

Quels sont les résultats de coopération franco-gabonaise en particulier et franco-africaine, c’est à dire la coopération entre la France et ses anciennes colonies, le problème même de l’indépendance. Lorsque l’on parle de rupture, il faut d’abord établir les termes de références de cette rupture. Qu’il en donne un contenu. La première chose qui vient à l’idée des analystes que nous sommes c’est la logique tel qu’établie depuis longtemps, c’est à dire des rapports quelque peu biaisés, quelques peu apolitique ou extra politique de la France et de l’Afrique.

Nous savons en termes de principe que les relations entre États sont de types synallagmatiques, c’est-à-dire réciproques. Mais, on a l’impression, si l’on fait une sorte de constat, de comptabilité dans cette coopération, que, c’est la France qui a gagné. Ce n’est pas une coopération gagnant-gagnant comme c’est le cas, comme le dit un peu la Chine, mais on a l’impression cinquante ans après historicité faisant foi, que c’est la France qui a gagné. Et c’est l’ensemble des quatorze ou quinze États francophones qui effectivement est à la queue en matière de développement tel que nous le voyons, l’Indice de Développement Humain. Est-ce cela la coopération? Nous disons non.

Et il faut avoir comme disait Kennedy, le courage, notamment les intellectuels. C’est nous qui devons – nous en approprier comme disait mon ami le professeur Théophile Obenga, c’est un problème psychotique.

Les intellectuels francophones ont une peur bleue de la France, et la France s’en complait. Cassez ce mur de Berlin, pour parler vrai, comme le disait Michel Roquart dans un ouvrage. Qu’est- ce que cela nous a rapporté depuis les cent soixante -dix ans? On parle d’accords depuis 1839, même si historiquement les relations ne sont pas celles d’un État à un autre, mais de domination. Un État constituant, la France et un Royaume considéré comme tel avec le roi Dénis Rapotchombo.

Si tant est que depuis 1960 où le Gabon a des postures de souveraineté, cette coopération reste toujours comme si c’étaient des relations assujetties au pacte colonial. Alors à partir de ce moment – là, il faudra parler plus que de rupture, identifier les éléments d’un new deal. Il faut un new deal qui permette de relancer cette relation dans une perspective gagnant-gagnant.

GABONEWS: La France et le Gabon s’engagent désormais dans un partenariat franc, fécond et durable. Qu’attendez-vous de ce new deal?

PROFESSEUR JEAN-MARC MISSO : La première chose, c’est la volonté politique de transparence. Comme promis, il faut que les accords soient des accords qui se basent sur des règles de transparence politique, la bonne gouvernance. La bonne gouvernance n’est pas seulement au niveau national mais elle a une certaine prévalence au niveau de la coopération. Que ces relations se fassent maintenant en termes de transparence. Qu’il n’y ait plus de secret, que le peuple s’en approprie, que nous sachions de quoi il est question dans cette coopération, pour qu’on sache au niveau politique ce qu’il en est, en termes de contenu et ainsi de suite.

Et que la participation et la participativité soient accomplies entre les deux. La rupture c’est d’abord cela. Qu’il n’y ait plus d’accords secrets. Ils sont secrets pour certains, mais pas pour l’historien que je suis. Les accords dont on parle actuellement ne sont rien d’autre que l’application de ce qu’on appelle le pacte colonial. Et il y a un ouvrage sorti en 1937 de Waterman qui disait “il faudrait que la France dans les rapports avec ses colonies quel que soit le temps, soient des rapports de domination. Et que les entités africaines soient ce que la France veut faire d’elles dans le temps et dans l’espace.

Cela signifie qu’il faudrait, quelles que soient les dénominations, indépendant ou quoi que ce soit d’autre, le fond étant la logique appliquée en terme de domination postcoloniale ou post colonialisme. Il faudra réviser cela, c’est pour cela que l’on parle courageusement du concept de rupture pour une logique gagnant-gagnant en matière de politique bilatérale.


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