Case à Palabres du BDP-Gabon Nouveau

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Conférences L'arbre à palabres africaines et internationales Discussion 48
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news-man
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18-sept-00, 20h42  (Heure de: New Jersey)
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"Document important"
 
   Voici un document traitant de la situation au Congo et de ses consequences sur le Gabon.
Je vous en revele un seul chapitre et la conclusion (l’ensemble est trop long).

CONGO-BRAZZAVILLE: LA GUERRE CIVILE ET SES CONSEQUENCES SUR LE GABON
By François Gaulme
3.2 Possibilités et limites d’une médiation gabonaise
Le chef de l’Etat gabonais est de très loin celui de toute la région qui s’est le plus impliqué dans des tentatives renouvelées de règlement des problèmes intérieurs du Congo-Brazzaville. Cela n’est pas dû simplement à l’étroite imbrication, soulignée plus haut, de la République gabonaise et de la République du Congo. Elle tient aussi à de facteurs hautement personnels.
Omar Bongo, de l’ethnie des atege (branche septentrionale du rameau teke), né en 1935 dans l’est du Haut-Ogooué, à l’époque donc de son rattachement au Moyen-Congo, a fait ses études secondaires à Brazzaville, où il s’est marié et a résidé jusqu’à son service militaire, juste avant l’indépendance. Avant celle-ci, jamais il n’avait vu Libreville, alors qu’il connaissait particulièrement bien la capitale congolaise. Sans doute pour cette raison et bien que l’on soit assez mal renseigné sur les débuts de la vie de fonctionnaire puis d’homme politique de celui qui s’appelait encore Albert Bongo, il semble qu’il ait joué un rôle d’intermédiaire dans la réconciliation entre le Congo de Fulbert Youlou et le Gabon de Léon Mba après les incidents de septembre 1962 entre les deux pays, consécutifs à un match de football.
Ensuite, malgré une tension latente entre Brazzaville devenue l’un des foyers du marxisme africain et l’ancienne “Cendrillon” endormie et oubliée de l’Afrique équatoriale, de plus en plus riche et intéressante stratégiquement grâce au pétrole de la côte et aux minerais (manganèse, uranium) du Haut-Ogooué, le nouveau président gabonais, sélectionné par les Français dès avant la mort de Léon Mba en novembre 1967, donna une importance nouvelle à sa province natale et, par voie de conséquence aux affaires congolaises. C’est l’étroitesse de ses relations avec le président Yhombi Opango qui conduisit indirectement à la chute de ce dernier, accusé de “déviationnisme bourgeois”. Mais son successeur Sassaou Nguesso se rapprocha à son tour de l’Occident et de la France, Elf Aquitaine devenant la société pétrolière la plus puissante politiquement à la fois à Libreville et à Brazzaville. En janvier 1990, après avoir divorcé de Joséphine Kama (une mbamba du Haut-Ogooué), Omar Bongo épousa officiellement Edith Sassou Nguesso, fille de son homologue congolais. A la même époque, il entretenait des contacts avec Pascal Lissouba, tandis que les relations entre nzebi du Congo et mbamba du Gabon n’avaient cessé de se renforcer depuis les années 40, notamment par l’intermédiaire du culte du Ndjobi.<10> En 1992, il soutint la candidature de Lissouba à la présidence et plaida en sa faveur dans différents milieux, à Paris ou ailleurs dans le monde.
Tout ceci explique que dès la première phase de la guerre civile congolaise, Omar Bongo eut un rôle de médiateur, ce qui conduisit dès le 4 août 1993 à la signature à Libreville d’accords entre parties congolaises. En juillet-octobre 1997, sa médiation s’exerça encore durant de longues semaines avant d’échouer, d’abord diplomatiquement à Libreville (malgré la réunion d’un Sommet sur le Congo-Brazzaville, regroupant huit chefs d’Etat, les 14 et 15 septembre) puis par l’action militaire déterminante de l’Angola. Aujourd’hui, le président gabonais a été confirmé, derechef et non moins officiellement, dans un rôle de médiateur, le 29 décembre à Brazzaville, au cours d’une cérémonie (à laquelle il assista en personne) de signature d’un accord de cessation d’hostilités entre les forces de Sassou Nguesso et le chef d’un groupement de miliciens rebelles, le colonel Boungou Boungou, représentant le “haut commandement des Forces d’auto-défense de la résistance (FADR)”.
Une vision rapide et optimiste des choses conduit à estimer que de tels efforts ont été efficaces, puisqu’ils se sont concrétisés, au moins temporairement, par des rapprochements réels. Néanmoins, force est de constater que, dans une perspective à moyen et long termes, ce n’est point le cas. Aucun des accords négociés précédemment à Libreville n’a tenu dans la durée. Rien ne garantit qu’il en sera différemment pour celui de décembre 1999, même si la lassitude de la guerre civile est perceptible au Congo et que la vie a repris un cours presque normal à Brazzaville. En particulier, une difficulté sur laquelle l’on risque d’achopper une fois de plus est la démilitarisation des jeunes miliciens qui n’étaient pas déjà dans l’armée congolaise et la remise aux autorités des armes qu’ils détiennent, contre leur intégration dans l’armée ou la fonction publique, avec un versement effectif des salaires et des soldes promises. En raison des exactions commises en 1999, l’on ne voit guère en outre un nettoyage militaire systématique du pays se faire sans problèmes dans les mois qui viennent, tout particulièrement dans le Sud.
Le fait que le Comité de suivi du dernier accord intérieur congolais soit placé sous l’autorité du président gabonais ne garantit rien à cet égard. Ce dernier ne parvient pas, en effet, à contrôler sa frontière et des Cocoyes ont, semble-t-il, trouvé dès maintenant refuge au Gabon.
Ce pays reste d’ailleurs, comme le Burundi vis à vis du Rwanda, un “faux-jumeau” du Congo dont la vie politique propre est influencée par ce qui se produit à Brazzaville, mais d’une manière non exclusive. En s’impliquant trop complètement dans les affaires congolaises, le président Bongo risquerait ainsi d’être désavoué (ou tacitement blâmé) par une partie de la classe politique de son pays, liée aux ethnies du Nord-Ouest (là où se trouve la capitale), les fang (qui détiennent traditionnellement le poste de Premier ministre) aussi bien que les côtiers myèné, qui se sentent très peu concernés par ce qui se passe au Congo-Brazzaville et dont le souci principal reste d’être épargnés par les conséquences de la crise globale de l’Afrique centrale.
La marge de manœuvre du chef de l’Etat gabonais est d’autant plus délicate que, dans son entourage immédiat, il trouve à la fois des gens très solidaires des “Nibolek” (en raison de la proximité mbamba-nzebi, avec notamment son fils Ali Bongo, ministre gabonais de la Défense et mbamba matrilinéaire par sa mère) et des partisans quasi inconditionnels de Sassou Nguesso (les teke de son clan paternel et patrilinéaire), qu’il a eu le plus grand mal à réunir à nouveau au cours de 1999 (ce qui explique en partie la longueur des dernières négociations inter-congolaises).<11> En 1997, du fait déjà de ces alliances partagées, le président Omar Bongo, qui passe souvent au Congo pour le gendre à la fois de Sassou Nguesso (mariage officiel) et de Lissouba (union polygamique coutumière) avait déjà été accusé de duplicité et c’est ce qui a entraîné alors sa rupture personnelle avec son homologue congolais de l’époque, Pascal Lissouba.
Il est donc hautement probable qu’une fois de plus, ce seront les rapports de force effectifs, plus que des constructions diplomatiques gabono-congolaises toujours très délicates, et quelques habiles qu’elles soient dans leur édification progressive, qui détermineront l’avenir de l’Afrique centrale dans son ensemble et du Congo-Brazzaville en particulier, ceci au moment où les derniers accords de Lusaka sur la RDC ont montré leurs limites.
De ce point de vue, le rôle de l’Angola, avec une armée gouvernementale de l’ordre de 50 000 hommes et capable d’intervenir à un niveau régional, demeure bien plus important que celui du Gabon, dont les forces armées effectivement équipées et entraînées se limitent à la “Garde républicaine” (= garde présidentielle) encadrée par des officiers mercenaires français et au petit contingent ayant servi à Bangui ces dernières années, soit quelques milliers de soldats seulement. La présence militaire continue de l’Angola au Congo-Brazzaville depuis octobre 1997 reste sans aucun doute le principal pilier du régime actuel, mais avec le risque permanent d’une déstabilisation locale encouragée directement par les rebelles angolais de l’Unita et leurs alliés (dont le Rwanda sous domination Tutsi).

4. Conclusion
Le Congo-Brazzaville et le Gabon sont aujourd’hui aussi étroitement liés au sommet de l’Etat qu’ils le demeurent d’autre part en fonction des liens tissés par l’histoire, surtout coloniale. Le fait que le Congo ne soit, territorialement, que l’enveloppe extérieure du Gabon implique un inévitable flux de réfugiés entre les deux pays en cas de guerre civile.
Mais, à l’expérience des trois conflits intérieurs congolais de 1993 à 1999, l’on constate aussi que le Gabon a cependant été relativement peu touché par les mouvements de population associés à ces phénomènes. Ceci s’explique notamment par le maintien de liens étroits entre les différentes composantes du cœur de l’ensemble ethnique kongo, très importante socialement et politiquement à Brazzaville comme à Pointe-Noire, mais dont le tropisme se tourne plus vers la RDC et l’Angola que vers le Gabon, en raison de leur histoire particulière.
Le seul risque grave associé au conflit civil à Brazzaville reste, pour le Gabon, celui d’être choisi éventuellement comme un sanctuaire des “Nibolek” congolais, au cas où aucun accord entre toutes les parties ne se révéleraient durable dans l’ancienne capitale de l’AEF. Ceci supposerait aussi une coupure intérieure du Gabon, ce sanctuaire se trouvant naturellement au sud-est, dans le Haut-Ogooué, province natale du président Bongo, tandis que Libreville, la capitale, dont le maire est un fang, resterait toujours volontairement, et autant que possible, en dehors du conflit congolais.
Enfin, il est difficile, à l’heure actuelle, d’évaluer l’impact éventuel de la crise financière, économique et sociale qui se développe au Gabon depuis 1999 sur l’évolution future du conflit intérieur congolais et le flux de réfugiés que génère ce dernier.


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